EXTRAITS DE MES CAHIERS

1, 2, 3, 4, 5 ou dix
Je ne suis pas un chiffre
Je vous parle de moi
Et vous comptez en unités
De douleur, d'horreur
Balayer les émois
Penser poids
Santé dites-vous
Mais qui êtes vous ?
Je suis une étrangère
A vos blouses blanches
A votre univers sectaire
Moi je veux vivre
Tant que je peux
Comme je veux
Isolement
Conditionnement
Pour guérir ils m'ont dit
Mais que faites-vous de la vie ?
C'est elle qui fait aimer
C'est elle qui fait exister
Et pour la prolonger
Parait-il
Il faudrait avoir la faiblesse de céder
Mettre entre parenthèse
Ma vie, un pied sur chaque chaise
Anorexique, Boulimique
Depressive et hystérique
Dépendante, agacante
Il faudrait que je troque
Mon bonheur
Contre vos médocs
Ce n'est peut être pas une vie
Mais moi je jouis
Du peu que j'obtiens
Dans ce contrôle vital
Dans cette anorexie finale
Comme un point d'arrêt
Mais sur lequel mon crayon
Reste appuyé

J'ai du mal à conjuger vivre et manger
Et à les accorder à tous les temps
Oter en moi cette différence
Du bon côté faire pencher la balance
Détruir ce miroir d'illusion
Qui me fait perdre bon sens et raison
Comment faire pour qu'elle me laisse tranquille
Vous me répondez comme si c'était si facile
Que je n'y mets aucune volonté
Car parler un peu c'est cicatriser
La plaie s'ouvrant dans le secret
Entrainée dans sa décadence
Délaissée de mes cinq sens
Je deviens sourde à vos questions
Muette à vos réflexions

Je ne vous parlerais pas
De ces maux qui font poids
Comme une toile de lin osseux
J'exprime ma douleur le long des creux

Je ne vous parlerais pas
De ces mains posés sur moi
De cette sombre allée
De ce jour de février

Je ne vous parlerais pas
De tous les secrets en moi
Non-dits, à qui
Devrais-je dire ce qu'on m'a pris

Je ne vous parlerais pas
De la souffrances des émois
Qui reviennent parfois
Mais savent être de bois
Dans mon coeur de pierre
J'ai l'âme d'une guerrière

Mais là j'déborde sur un sujet fragile
Je glisse sur la corde sensible
Alors j'arrête de jouer avec les mots
Pour ne pas en dire trop
Le secret a sa valeur
Celle de me préserver
Ivresse d'un ailleurs
Comme si j'buvais pour oublier

J'ai le corps qui parle
Qui vous dit
A quel point j'ai mal
J'ai le coeur qui oublie
De vous confier
Les inévitables secrets
J'ai le regard qui trahit
De tout ce que je ne vous ai jamais dit

Il y a ce sang qui coule dans mes veines
Il y a ces souvenirs
Puits sans fonds de haine
Argile trop fragile pour batir un avenir

J'ai le corps qui crie
De cette douleur qui me détruit
De ces coups que j'ai subi
J'ai le coeur qui nie
Avoir besoin de son ennemi
Etre dépendant de vos vies

Il y a ces marques sur mon corps
Il y a ces ombres invisibles
Petits pas vers la mort
Traces de ces secrets indicibles

J'ai le corps qui fatigue
D'avoir trop subi
Entre deux eaux il navigue
J'ai le coeur qui pleure
De ne pas être à la hauteur
De résumer l'amour à la peur

Il y a ces images, comme des épines dans le coeur
Il y a ces mots gravés dans mon âme
Une claque, un crêve-coeur
Et moi, que chaque jour, je blame.

Je n'en peux plus de cette anorexie
De mon corps qui fatigue
De ma vie que se défile
Il me faudrait plus de deux mains
Pour compter le nombre de fois où j'ai vu les pommes
En ce début d'automne
Temps Destin
Et la liste s'agrandit
Le gouffre, la douleur aussi
Déraison & Violence
Orgueil & Préjugés
J'en peux plus du passé qui court après moi
De ce présent que je ne saisis pas
Il y a tant de chose que j'aurais voulu
Mais pour lesquelles aujourd'hui comme demain
Je ne me battrais plus
J'aurais voulu ne pas lui ressembler
Pouvoir, moi, me contrôler
Mais la violence, ces coups de sangs font partie de moi
Je n'en peux plus de ces silences
De leurs absences, de cette sacro-sainte dépendance
J'aurais voulu accepter sa douleur
Et faire de notre relation passée une lueur
Mais je n'en peux plus
J'aurais voulu ne pas être excessive
Raisonablement adulte
Sagement rangée
J'aurais voulu
Mais je n'ai pas pu
Parc'qu'j'suis
Q'un sac de noeud
40 kilos de fils entremelés
D'histoire à décoder
De problèmes à résorber

Jeûne fille silence

Toujours accompagnée
Feignant l'assurance
Pour épargner toute clémence
De ceux qui voudrait avoir pitié

Bavarde mondaine
Se prive de "je t'aime"
Mais cultive la haine
d'Elle-même

Un homme parti
D'autres de passage dans son lit
Une solitude à vie
Une absence que rien ne guérit

Jeûne fille silence
cherche la transparence
Jeûne fille silence
Tait l'absence

Elle aime par épisode
S'isole dans son exode
Et tant pis si elle crève
La haine si forte, lui pèse

Personne ne peut la suivre
Elle parle trop vite
A vous rendre Ivre
Ses yeux se taisent
Témoignant du malaise

Jeûne fille silence
Meurt sans un mot
De trop de manques
De trop de mots

Il y a des vides
Que personne ne peut combler
Il y a des morceaux
Que personne ne peut recoller

Jeûne fille silence
Doucement se penche
Ne croyant plus à sa chance
S'écroule dans sa dernière danse

Ouvre la page d'un magazine
Et tu verras
Ce que tu ne peux pas être
Ne crois pas que le paraitre
est bien être
N'écoute pas la petite voix qui
au fond de toi dit à la poupée parfaite
"Je voudrais être toi"
C'est un jeu dangereux
Que de se risquer
A vouloir ressembler
A ces tops models de calendrier
C'est un mauvais début
Que de se priver
Que de s'efforcer
A les imiter
Ideal loin de la malade
"C'est rien, c'est pour mon bien"
Paroles d'un enfer qui apparait
Et te voilà en train de te vider
de t'épuiser
La mode n'est pas la mort
Ce n'est pas là que tu trouveras
En toi l'adulte qui triomphera
Ne la laisse pas gagner
Cette vague idée
D'une femme parfaite
Ferme le ce magazine
Qui te ferait croire
A une femme divine
Elle fait mal celle là
Cette femme qui ne te ressemble pas