Pourquoi séparer l’anorexique de son entourage ?

Le Concours Médical 706 Tome 125-12 02-04-2003

Pourquoi séparer l’anorexique de son entourage ?

EN FILIGRANE SE JOUE UNE AUTRE
INTERROGATION : L ’ANOREXIE MENTALE NE
D ÉPEND-ELLE QUE DE L’ADOLESCENT
OU S’ A G I T - I L D ’UNE PATHOLOGIE DU LIEN
FAMILIAL ET SOCIAL ?


LE CONTEXTE D’ACTUALITÉ
La méconnaissance des lieux de soins et des indications
de la prise en charge hospitalière de l’anorexie mentale
(malnutrition sévère, échec du traitement ambulatoire,
complications médicales, idéation suicidaire, comorbidité
psychiatrique) aboutit souvent à une demande d’hospitalisation.
Ce constat a conduit à la création du réseau
Troubles du comportement alimentaire – Île-de-France,
qui compte aujourd’hui 800 patientes en file active, dont
les deux tiers ne sont pas hospitalisées. Lors d’un colloque
organisé par ce réseau de soins (1), M.F. Le Heuzey a rappelé
comment, au début du siècle dernier, les médecins
« n’hésitaient pas à utiliser la sonde, la force, l’isolement et
la séparation pour traiter les anorexiques ». Depuis que les
vertus de l’isolement ont été vantées, dès 1859 par
L.V. Marcé, puis par Charcot, cette mesure a été systématique,
au point que « l’on ne sait plus d’où vient cette
pratique, ni quelle est l’idéologie scientifique qui la soustend
» (G. Raimbault, C. Eliacheff). Dans certains services,
la séparation « s’intègre dans un traitement comportemental
où chaque prise de poids est récompensée par
une visite. Dans d’autres services, elle est considérée
comme une expérience maturante nécessaire à une bonne
évolution psychique ». M.F. Le Heuzey rapporte deux
observations, chez des anorexiques de 15 ans et de
10 ans, où la participation des parents à la prise en
charge hospitalière et le fait d’exiger d’eux un rapprochement
se sont traduits par une reprise de poids ; l’annonce
d’une non-séparation pendant l’hospitalisation a
pu soulager la famille (2). Ainsi, « loin d’être écartés dans
une “parentectomie arbitraire”, les parents doivent être
associés dans une véritable alliance », sauf bien sûr en
cas de maltraitance familiale ou de dysfonctionnement
familial évident ; l’indication de l’hospitalisation d’un
jeune patient doit rester rare. M.F. Le Heuzey mentionne
les alternatives à l’hospitalisation classique, proposées
pour respecter le droit des malades (droit à l’éducation
et à la scolarité), pour permettre le maintien dans la
vraie vie, d’autant que « l’hôpital vécu comme un refuge
protège du stress de la vie. C’est encore plus net s’il y a une
séparation d’avec la famille ».
Christine MAILLARD
1. Colloque Éthique et troubles du comportement alimentaire, Paris,
3 février 2003.
2. Le Heuzey MF. Faut-il encore isoler les jeunes anorexiques mentales ?
Ann Med Psychol 2002 ; 160 : 327-331.

et je me demandais, si sur notre forum spécial projet, des personnes pouvaient témoigner sur leur hospitalisation et comment elles ont vécu cette séparation de la famille. Comment leur famille a-t-elle été prise en charge psychiquement aussi...
Qui a un témoignage à ce sujet ? autant de la part du patient que de la famille.
Ces séparations semblent être remises en compte à l'Etranger, plus en avance que nous. Qu'en pensez vous ?